Leclanché, les batteries XXL

Installé depuis 113 ans sur sol vaudois, le groupe Leclanché fait face au double défi de la croissance de son secteur d’activités, et de son verdissement.

Depuis sa création en 1909, Leclanché est active dans le domaine du stockage de l’énergie. Repositionnée récemment sur les nouveaux marchés de l’électromobilité, l’entreprise est composée de trois entités principales. La première est dédiée aux produits pour les secteurs militaires et médicaux. La seconde axée sur les produits pour applications dans le domaine du stockage stationnaire de l’énergie et l’intégration des énergies renouvelables. Et la troisième, la plus importante, qui produit essentiellement des systèmes de batterie pour les industries maritimes, ferroviaires et véhicules industriels. Le principal site de production se trouve à Yverdon-les-Bains (environ 290 salariés sur les 350 que compte le groupe, dont les unités de R&D). Une antenne existe également à Wilstätt en Allemagne. C’est là que sont produites les cellules lithium-ion. Elle a été développée pour avoir une empreinte dans l’Union européenne et une proximité physique avec certains partenaires, tout comme un accès facilité à certains programmes et financements de l’UE. Aujourd’hui, Leclanché bénéficie de la forte croissance de son secteur. Unique entreprise de son domaine à être cotée à la bourse suisse, elle fait face à plusieurs choix stratégiques, mais n’entend pas remettre en cause son implantation vaudoise, bien au contraire : une nouvelle ligne de production vient d’être mise en place dans son usine d’Yverdon-les-Bains. Entretien avec Pierre Blanc, son CTO.

Quels sont vos produits/services ?
Depuis 2015, nous avons fait pivoter l'entreprise pour nous concentrer sur les moyens de transport moyens et lourds, ce qui comprend les trains et les locomotives, les navires et bateaux de toutes sortes, les véhicules commerciaux tels que les camions, les véhicules miniers et agricoles. Ils sont tous basés sur une technologie 100% interne à Leclanché. On parle d’équipements de 50 à 70 tonnes qui comprennent nos propres cellules lithium-ion, et également tous les éléments autour : gestion électronique, système de refroidissement, système d’extinction en cas d’incendie etc. Nous produisons tous les éléments en interne, ou alors nous les codéveloppons, comme c’est le cas pour le système d’extinction par exemple. Nous proposons aussi à nos clients tout un service de démontage et de recyclage. Les concepts de recyclage sont intégrés dès la production. Nous travaillons aussi avec des partenaires dans nos pays de vente, car les obligations légales en matière de recyclage peuvent y différer.
 
Comment Innovaud vous a soutenus ?
Innovaud a facilité et aidé à mettre en place beaucoup d’aides financières et de contacts avec le service de la promotion économique ou le monde académique. Nous avons ainsi pu plus facilement développer ou industrialiser certains produits, travailler sur des conceptions innovantes avec des hautes écoles locales. Enfin, Innovaud a initié un forum d’échanges sur l’industrie 4.0, important pour nous car cela participe à l’optimisation des structures et des coûts : comment améliorer l’efficacité de notre production ? Et Innovaud nous met en réseau avec d’autres entreprises, organise des visites avec différents partenaires ou partenaires potentiels afin de réfléchir sur des projets communs, sur l’aide mutuelle que nous pouvons nous apporter. L’aide d’Innovaud est donc assez vaste et recouvre une série de secteurs : politiques, académiques, entrepreneuriaux.
 
En quoi votre technologie est innovante ?
Nous avons voulu, dès le départ, une technologie de production aussi verte que possible, afin d’être cohérents avec notre marché, celui de la mobilité électrique. Nous sommes donc une des seules compagnies au monde à ne pas utiliser de solvants organiques, extrêmement toxiques, dans la production. Nous n’émettons que de la vapeur d’eau. Ce choix est également stratégique : il permet de réduire les coûts, la dépendance à ces composants, et limite les contraintes en termes de manipulation tout comme l’exposition des travailleurs. Avec l’évolution de la réglementation dans l’UE ces dix prochaines années, notre technologie va devenir de plus en plus répandue chez les autres constructeurs.
 
Quels sont les défis actuels de l’entreprise ?
Notre monde change très vite : beaucoup de marchés sont en transition vers les énergies vertes, la réduction du CO2 et de la dépendance aux énergies fossiles. Le défi pour nous c’est de suivre cette cadence et de croître à la vitesse de nos partenaires, qui sont de très grands groupes, tout en maintenant la qualité, l’extension foncière et en trouvant la main-d'œuvre. On parle d’une augmentation significative du chiffre d’affaires chaque année pendant trois à quatre ans.
Nous avons scindé la compagnie en plusieurs entités dans ce but : financer plus facilement le secteur qui fait face à la plus forte croissance. Il s’agit très vite de réaliser plusieurs centaines de millions de francs d’investissement, pour des revenus qui arrivent trois à cinq ans plus tard.
 
Face à ces défis, quel est l’intérêt d’être dans le canton de Vaud pour vous ?
Nous sommes ici depuis 113 ans, et avons l’avantage d’être à proximité de plusieurs grandes villes, ce qui permet d’attirer des candidats au travers des hautes écoles, ou de nouveaux employés car la qualité de vie est bonne.
Nous sommes dans un secteur extrêmement compétitif donc tous les atouts pour faire venir des talents sont importants. Nous ne pouvons pas rivaliser avec toutes les industries automobiles d’Europe qui sont en train d’opérer leur virage vert, nous devons avoir d’autres attraits. La qualité de vie pour les travailleurs, leurs familles, la qualité de l’enseignement : tous ces aspects jouent un rôle-clé et sont présents ici. Nous prévoyons de continuer à nous développer dans le canton de Vaud, qui accueille en particulier les activités à forte plus-value ainsi que sur notre site allemand – les activités sont complémentaires, et le développement d’un site ne remet pas en question celui de l’autre.
 
Un enjeu qui vous garde éveillé la nuit ?
Nous sommes probablement une des seules entreprises Suisse cotées en bourse du secteur : cela apporte des avantages et des désavantages. Tous nos résultats sont publics et quand on investit beaucoup dans des domaines en croissance alors que les revenus arrivent plus tard, ce décalage est visible publiquement, alors que pour d’autres entreprises, beaucoup plus grandes, cette visibilité n’est pas aussi évidente.
 
Vos projets de développement ?
Nous travaillons sur des structures de financement qui devraient être annoncées prochainement, tout comme l’annonce de clients et projets supplémentaires qui sont en voie d’acquisition. D’autres annonces suivront dans les mois à venir, et toutes montrent l’importance du marché et son développement fulgurant.


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Pierre Blanc - CTO de Leclanché